Rétroactivité des lois pénales plus douces et réglementation douanière économique

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17/08/2018
Transport - Douane

La CJUE remet les pendules à l’heure : la rétroactivité in mitius ne concerne pas une réglementation économique communautaire/de l’Union.

Petit voyage dans le temps. En 2016, la Cour de cassation interroge la CJUE via une question préjudicielle pour savoir si le principe de la rétroactivité de la loi pénale plus douce disparait en présence d'une réglementation économique (Cass. crim., 23 nov. 2016, n° 15-82.333, Bull. crim., n° 308). Dans cette affaire, pour échapper à une condamnation, un opérateur invoque ce principe avec succès. Les juges du fond le relaxent en effet en ne retenant pas contre lui les fausses déclarations ayant pour but ou pour effet d'obtenir, en tout ou partie, un remboursement, une exonération, un droit réduit ou un avantage quelconque attaché à l'importation ou à l'exportation, du 4º de l'article 426 du Code des douanes : il avait certes obtenu ainsi des restitutions à l'exportation pour des morceaux de bœuf qui ne pouvaient en bénéficier, mais, postérieurement aux faits, ces morceaux pouvaient en bénéficier à la suite d'un changement de la règlementation communautaire, de nature économique.

La Cour de justice, qui recentre le débat, rappelle que « l’application de la loi pénale plus douce implique nécessairement une succession de lois dans le temps et repose sur la constatation que le législateur a changé d’avis soit sur la qualification pénale des faits soit sur la peine à appliquer à une infraction ». Or, en l’espèce, ni la qualification pénale, ni la sanction de l’article 426 précité n’ont changé : les fausses déclarations ou les manœuvres ayant pour effet d’obtenir un avantage attaché à l’exportation demeurent donc pénalement répréhensibles de la même manière qu’à la date des faits en cause au principal.

 

La seule modification intervenue dans le cadre de la réglementation de l’Union concerne certes l’introduction d’une restitution particulière à l’exportation pour adapter cette réglementation, ce qui implique une « appréciation purement économique et technique de la situation du marché global de la viande ». Pour autant, cette modification ne vise pas à remettre en question la qualification pénale ou l’appréciation, par les autorités nationales compétentes, de la peine à appliquer à des comportements ayant pour effet d’obtenir indûment des restitutions particulières, tels que les fausses déclarations ou les manœuvres reprochées à l’opérateur. De plus, cette modification n’a pas changé les éléments constitutifs de l’infraction reprochée à l’opérateur : l’infraction concerne des fausses déclarations ou des manœuvres ayant pour effet d’obtenir des restitutions particulières à l’exportation et la circonstance que, postérieurement aux faits, les marchandises pour lesquelles ces restitutions ont été demandées soient devenues éligibles à ce bénéfice n’affecte pas le caractère pénalement répréhensible des fausses déclarations ou manœuvres.

 

Plus d’information sur ce sujet dans Le Lamy transport, tome 2.

Source : Actualités du droit