Infraction douanière : incompétence de la juridiction correctionnelle si l'incrimination a été abrogée avant sa saisine

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04/01/2018
Pénal - Procédure pénale
Transport - Douane

Saisie d'une infraction douanière, la juridiction correctionnelle qui retient que l'incrimination a été abrogée avant sa saisine n'est pas compétente pour statuer sur la demande en paiement des droits éludés. Ainsi statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation le 20 décembre 2017.

Courant 1998, une enquête avait été initiée par la Direction des enquêtes douanières concernant l'importation de filets de poulet en provenance de Chine et de Thaïlande entre 1995 et 1997. Les douanes avaient relevé qu'à partir de 1995, la société N. devenue T., dont M. X était le directeur commercial et M. M le gérant, avait proposé à diverses sociétés françaises, dont la société C. dirigée par Mme V, de dédouaner des filets de poulet originaires de Chine ou de Thaïlande sur la base de fausses déclarations de valeur, afin d'éluder tout ou partie des droits additionnels exigibles. Le dédouanement des marchandises litigieuses était opéré par le commissionnaire en douane, la société F. dont M. F était le gérant. A l'issue de l'enquête, l'administration des douanes avait remis en cause les déclarations d'importation effectuées et avait cité M. X, M. M, M. F, la société F. et Mme V du chef d'importation sans déclaration de marchandises prohibées devant le tribunal correctionnel qui, après avoir jugé qu'il n'était saisi que des importations en provenance de Chine, les avait déclarés responsables et condamnés au paiement des droits éludés par un jugement dont les prévenus ont interjeté appel.

Pour rejeter l'exception d'incompétence du tribunal correctionnel pour statuer sur la demande en paiement des droits éludés, l'arrêt énonce que la juridiction pénale, même lorsqu'elle ne prononce pas de condamnation, reste compétente, sur le fondement des dispositions du 4 de l'article 369 du Code des douanes, peu important que cette absence de condamnation résulte notamment de l'abrogation de la loi pénale avant ou après la saisine du tribunal. Les juges ajoutent que si la mention de la Chine a effectivement été supprimée de la nouvelle annexe des pays assujettis aux droit additionnels en matière de viande de volaille à la suite du Règlement n° 1963/98 du 15 septembre 1998, le principe de rétroactivité de la loi pénale plus douce n'est pas applicable à l'action civile en paiement des droits éludés.

La Chambre criminelle estime, au visa des articles 357 bis et 377 bis du Code des douanes, qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte qu'elle a constaté que l'incrimination avait disparu avant sa saisine, la cour a méconnu les textes et le principe susvisés.

Par Marie Le Guerroué

Source : Actualités du droit