Digitalisation en 2023 au Symposium Douane de Class Export

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03/02/2023
Transport - Douane

Compliance, refonte de l’Import-Export et dédouanement centralisé communautaire étaient notamment au programme de la matinée dédiée à la digitalisation en 2023 lors du symposium de Class Export qui s’est tenu le 2 février 2023.
Enjeux de la digitalisation : compliance et bonnes data
 
La digitalisation pour la Douane, c’est d’abord la fluidification et la sécurisation des échanges selon Guillaume Vanderhayden, le sous-directeur au commerce international à la DGDDI. Cela passe bien sûr par la data et par la refondation de Delta Import-Export en 2023 (avec l’abandon du DAU pou un jeu de données). À l’origine de ces évolutions, on trouve notamment une « ambition » forte de la Commission européenne s’agissant de l’intégration européenne en matière de digitalisation, avec le single window, qui est un « gros sujet de compliance » douanière et non douanière pour les entreprises. Et il faut de la « bonne donnée », ce qui implique une expertise au sein de l’entreprise et la maitrise des fondamentaux (par exemple le triptyque espèce, origine et valeur), mais aussi de la donnée fiable et traçable s’agissant des réglementations douanières et non douanières (avec bientôt les minerais de conflit, le travail forcé, le mécanisme d’ajustement carbone au frontière, etc.), ces dernières pouvant présenter le risque d’entrainer des blocages aux frontières (et non pas en douane). Heureusement, ajoute-t-il, l’OEA peut aider en la matière et la Commission aurait même selon lui « une piste de super OEA » avec les inscriptions dans les écritures douanières.
 
Digitalisation et réforme de l’import-export : anticiper toujours !
 
Stéphane Boissavy, le Directeur du Programme Import/Export (SD COMINT) à la DGDDI, revient sur la mise en œuvre du CDU sous l’angle informatique et la digitalisation qui permet :
  •  de sécuriser, au sens de tracer, et sur ce point ICS2 est emblématique ;
  • d’harmoniser entre les États membres : la digitalisation est ainsi appréhendée dans l’annexe B du CDU de sorte qu’une seule méthodologie soit utilisée pour tous les types de déclaration, ce qui permet une réutilisation utile des données ;
  • de bénéficier des simplifications, même si certaines de celles-ci dans le CDU n’ont pas encore été proposées pour le moment, à défaut de moyens techniques.
 
Pour la réalisation des échéances informatiques jusqu’en 2025, il rappelle aussi qu’il faut prendre en compte le temps de la mise en œuvre technique et que des facteurs exogènes (Brexit, Covid, e-commerce, etc.) ont mis à mal le calendrier initial. Il demeure 7 projets sur les 3 années restantes et d’ici 2025 le rythme de transformation est important : les opérateurs comme la DGDDI ont « du pain sur la planche », mais les entreprises ne sont pas seules, la Douane poursuivant sa mission d’accompagnement (sur ce point et cette alerte, voir aussi en dernier lieu « Refonte de l’Import Export : des précisions de la Douane au comité utilisateurs », Actualités du droit, 13 déc. 2022).
 
Si l’être humain est en général réfractaire au changement et exprime facilement ses inquiétudes, Karim Medjgal, directeur commercial Douane chez l’éditeur de logiciels Akanea, adopte au contraire une attitude résolument positive face à l’initiative numérique de l’UE qui crée un espace douanier plus efficace et sécurisé et harmonise entre les États membres la structure des données qui devient commune pour plusieurs opérations, rendant plus facile leur collecte et leur traitement. Il souligne aussi le « rôle axial » de la DGDDI sur ce sujet, ce que confirmera aussi notamment Jean-Michel Garcia du groupe de travail sur la digitalisation au sein de la commission douane de l’AUTF s’agissant de la diffusion des informations au fil de l’eau sur les évolutions de la refonte de l’import-export s’agissant des calendriers et des aspects informatiques et techniques.
 
Michel Baron, le chef du bureau de la politique du dédouanement (COMINT-1), complète la présentation du futur de l’import-export en soulignant que le sujet de la digitalisation porte pour le moment « surtout sur 2023 » avec la réforme de l’avant dédouanement et le volet importation : ICS2 pour le vecteur aérien sera déployé le 30 juin 2023 avec le module PNTS (Notification de présentation et de dépôt temporaire). En 2024, ICS2 et PNT concerneront tous les autres vecteurs de transport (la route, dont le fer, et le maritime) et « c’est là le vrai enjeu », 2023 portant seulement sur l’aérien avec un nombre limité d’opérateurs concernés.
 
S’agissant de Delta en 2023, une expérimentation aura lieu avec une dizaine d’opérateurs à partir du 15 juin, ajoute Michel Baron. Puis, au 15 septembre 2023 Delta G et X sont remplacés par Delta Import-Export (IE). Une période de transition de trois mois (donc jusqu’au 15 décembre suivant) est prévue de sorte que fin 2023 Delta G et X ne fonctionnent plus pour les déclarations nouvelles qui passeront par Delta-IE. Toutefois, Delta G et X continueront pour les déclarations déposées en 2023 pour les contrôles et les rectifications et invalidations des déclarations. L’année 2024 connaitra donc une coexistence des systèmes Delta G et X et Delta-IE.
 
Comme le rappelle Claire Fournier de Conex, la réforme du DAU, qui existe depuis plus de 35 ans, impliquera le passage d’un document de 54 cases à un jeu de données de 80 éléments au maximum, mais avec des situations variables selon les déclarations (sont mentionnées par exemple parmi ces données la création de la notion de « partie » pour les intervenants et celle nouvelle aussi d’« acheteur », qui sera souvent l’importateur, ou encore la « garantie » qui remplacera le « crédit d’enlèvement » et le « crédit pour opérations diverses »). Elle rappelle aussi la réflexion en cours à la Douane s’agissant de la forme d’un document édité de cette déclaration qui pourrait servir notamment à la facturation. Sur ce document, Alban Gruson, le PDG de Conex, mentionne le risque que le modèle de la Douane française ne soit pas reconnu par les autres États membres, ce à quoi Sandra Francerie-Deliau, la cheffe de section processus import-export et e-commerce au Bureau COMINT-1 de la DGDDI, répond que ce projet de document est porté par la France auprès de la Commission afin de parvenir à une utile harmonisation. Elle précise aussi qu’un comparatif entre les cases du DAU et le jeu de données sera bientôt présenté par la Douane et que les instructions à venir de la DGDDI sur la future déclaration en douane sont toujours en cours de rédaction et remplaceront celles sur le DAU.
 
Suppression de la D48 ? Répondant à une question, Sandra Francerie-Deliau confirme la disparition de la soumission D48 (voir Refonte de l’Import Export : des précisions de la Douane au comité utilisateurs, Actualités du droit, 13 déc. 2022), et précise que sa suppression se fait au profit d’une nouvelle modalité de déclaration simplifiée et de déclaration complémentaire (en deux temps) et qu’il faudra anticiper avec le bureau de douane d’autorisation. Elle ajoute que des instructions sur ce point sont à venir, des validations en interne s’agissant d’éléments comptables étant alors actuellement en attente.
Effet de la digitalisation sur l’archivage des documents ? Répondant à une autre question sur ce point, la douanière indique que rien ne change pour les opérateurs, leur seule obligation demeurant de présenter « à première réquisition » de la Douane les informations demandées par cette administration.
 
Dédouanement centralisé communautaire (DCC) : bien estimer le besoin et anticiper aussi !
 
Rappelant que le dédouanement centralisé national (DCN) fait l’objet de 1 400 agréments accordés à des opérateurs (OEA ou non), avec plus de 2 400 liaisons entre bureaux de présentation et de déclaration, Michel Baron voit là la preuve d’un « succès » du DCN auprès des opérateurs. Si le DCN, qui avait été pensé comme une préparation au DCC, répond donc à un besoin, le DCC pourrait lui aussi répondre à un besoin des opérateurs en tant que facteur de rationalisation et d’économie.
 
Sandra Francerie-Deliau confirme que des DCC fonctionnent en France avec quelques procédures concernant des bureaux de présentation et de déclaration (d’anciennes PDUC ayant été transformées en DCC et de nouveaux DCC ayant été accordés) mais qu’il n’y a pas d’outil pour les échanges de données entre États membres. Selon elle, Delta IE est un prérequis, tout comme des systèmes correspondants dans les autres États membres, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui (sauf par exemple en Allemagne, en Autriche, aux Pays-Bas, en Italie ou en République tchèque), les échanges se faisant par mails et téléphone, avec parfois les difficultés tenant à la diversité des langues. Bref, « c’est compliqué » ! Mais la logique du DCC dans le CDU est de faciliter les flux logistiques et déclaratifs quel que soit le lieu de présentation des marchandises, afin notamment d’offrir des économies et une adaptabilité aux opérateurs. Comme la réforme complète de l’import-export est fixée à 2024, ces opérateurs « doivent anticiper » leur réflexion sur ce sujet : le DCC nécessite en effet un travail entre les États membres, des process et le recours à un outil informatique « contraint » avec « une longue période d’instruction », une garantie et des prérequis pour la TVA et représentation. Aussi, ajoute la douanière, Plus le travail de réflexion en amont du demandeur au DCC sera important (s’agissant de la précision des flux, des marchandises et des conditions en général), plus le temps d’instruction sera réduit. Jacqueline Plantier, la responsable du service grands comptes (SGC), confirme elle-aussi que « l’aventure du DCC » implique, pour aboutir utilement à l’autorisation, une grande « maturité » de l’opérateur qui doit s’interroger sérieusement sur son utilité.
 
 
 
Source : Actualités du droit