« Dernier recours » pour la valeur en douane : base de données et souplesse raisonnable

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15/06/2022
Transport - Douane

Les informations contenues dans une base de données douanière nationale, portant sur des marchandises relevant du même code TARIC et provenant du même vendeur que celles concernées par la méthode dite du « dernier recours » pour la détermination de la valeur en douane de marchandises importées, constituent une « donnée disponible dans l’Union », au sens de l’article 31 (§ 1) de l’ex-Code des douanes communautaire, même si elles ne sont pas des « marchandises similaires » au sens de l’article 142, qui doit être interprété souplement, du règlement d’application de ce code, selon un arrêt de la CJUE du 9 juin 2022.
Dans l’affaire déjà exposée dans ces colonnes à propos de la notion de « personnes liées (voir notre actualité), l’importateur a indiqué dans ses déclarations en douane que ses marchandises étaient des « parties de machines et appareils pour le conditionnement de l’air », n’a mentionné qu’un seul code TARIC, accompagné de la masse totale en kilogrammes, et a porté comme valeur en douane la valeur transactionnelle (le prix figurant sur leurs factures d’achat). À la suite de son contrôle, la Douane lituanienne ayant refusé de tenir compte de cette valeur transactionnelle au motif aussi qu’il était impossible de déterminer la valeur en douane des marchandises en cause sur le fondement des articles 29 et 30 de l’ex-Code des douanes communautaire (CDC), a arrêté cette valeur conformément à l’article 31 de cet ex-CDC (donc avec la méthode dite du « dernier recours »), en s’appuyant sur les données contenues dans son système d’information sur le dédouanement des marchandises.
 
Pour mémoire, cet article 31 disposait en son paragraphe 1 que, si la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée par application des articles 29 et 30, elle est déterminée « sur la base des données disponibles dans la Communauté, par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales » du GATT et des dispositions du chapitre auquel appartient cet article 31 dans l’ex-CDC. Pour mémoire encore, ainsi que le relève la CJUE (au point 48 de son arrêt ici exposé), le point 2 de la note interprétative relative à l’article 31, § 1, figurant à l’annexe 23 de l’ex-règlement d’application du CDC (le CDC, RA), soulignait que les méthodes d’évaluation à employer en vertu de cet article devraient être celles que définissent les articles 29 à 30, § 2 (dont par conséquent celle relative à l’importation de marchandises similaires), mais qu’une souplesse raisonnable dans l’application de ces méthodes serait conforme aux objectifs et aux dispositions de l’article 31.
 
Marchandises similaires : homogénéité pour l’article 142
 
Or, la juridiction de renvoi s’interroge, et interroge donc la CJUE, sur la possibilité de recourir à la méthode de cet article 31 (§ 1), lorsque, comme en l’espèce, la Douane utilise « des informations contenues dans une base de données nationale ne portant que sur une seule importation de marchandises, qui, bien que relevant du même code TARIC, et provenant de la même origine [Ndlr : au sens du même fabricant], ne sauraient être considérées comme étant similaires, au sens de l’article 142, paragraphe 1, sous d) » de l’ex-CDC, RA. Pour mémoire toujours, ce point d) définissait les « marchandises similaires » comme celles « produites dans le même pays qui, sans être pareilles à tous égards, présentent des caractéristiques semblables et sont composées de matières semblables, ce qui leur permet de remplir les mêmes fonctions et d’être commercialement interchangeables (...) ». (Point 49) En l’espèce, la Douane a déterminé la valeur via l’article 31 (§ 1), en utilisant des données contenues dans une base de données nationale portant sur des marchandises importées déclarées sous le même code TARIC et provenant du même fabricant.
 
(point 50), Selon la CJUE, le code TARIC utilisé regroupant en l’espèce un ensemble disparate de parties de machines pour le conditionnement de l’air (panneaux en plastique pour machines à moteur, bagues métalliques, tuyaux, câbles de transmission, interrupteurs, capteurs de pression, dispositifs de diffusion par tourbillon dans les sols des bâtiments et circuits électroniques), la juridiction de renvoi se demande si, compte tenu de l’hétérogénéité des pièces relevant de ce code TARIC et de l’absence de description détaillée des marchandises importées, le recours à l’article 31, § 1, sur la base de la valeur transactionnelle de marchandises similaires, est possible en l’espèce, alors que la notion de « marchandises similaires », définie à l’article 142, § 1, sous d), suppose une homogénéité des marchandises importées, qui s’accommode difficilement de la diversité des produits classés sous ledit code TARIC.
 
Marchandises similaires et souplesse raisonnable de l’article 31 (§ 1)
 
(point 52 et s.) Pour la CJUE, qui se fonde – comme elle l’a indiqué dans son point 48 précité – sur l’application de la méthode fondée sur les « marchandises similaires » avec une souplesse raisonnable, notamment s’agissant de l’appréciation de ces dernières, il convient d’admettre que des données contenues dans une base de données nationale, portant sur des marchandises relevant du même code TARIC et provenant du même vendeur que les marchandises concernées, constituent une « donnée disponible dans l’Union », au sens de l’article 31 (§ 1) (donc même si elles ne sont pas des marchandises similaires au sens de l’article 142 précité).
 
Et avec le Code des douanes de l’Union ?
 
La solution serait selon nous identique sous l’empire du Code des douanes de l’Union : en effet, les articles 31 (§ 1) de l’ex-CDC et 142 de l’ex-CDC, RA, ci-dessus trouvent des correspondances à l’article 74 du CDU et à l'article 144 du CDU, AE.
 
La décision ici exposée est intégrée à la publication en référence ci-dessous dans sa version en ligne sur Lamyline au plus vite.
 
 
Source : Actualités du droit